Chapitre 2 : Compléments d'Algèbre linéaire

3 Eléments propres d'un endomorphisme

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3 Eléments propres d'un endomorphisme

Notation :   $ E$ est un espace vectoriel sur $ \mathbb{K}$ $ (\mathbb{R}$ ou $ \mathbb{C)}$, de dimension finie ou non.$ \varphi:E\rightarrow E$ est un endomorphisme.

3.1 Valeurs propres et vecteurs propres

Définition :   $ \lambda\in\mathbb{K}$ et $ u\in E$ est un couple valeur propre, vecteur propre de \begin{displaymath}\varphi\Leftrightarrow\left\{ \begin{array}[c]{l} u\neq0\\ \varphi\left( u\right) =\lambda.u \end{array} \right. \end{displaymath}

Remarque :   Un vecteur propre n'est jamais nul.

Théorème :   $ \lambda\in\mathbb{K}$ est une valeur propre de $ \varphi\Leftrightarrow \ker\left( \varphi-\lambda.Id_{E}\right) \neq\{0\}$

Définition :   L'ensemble des valeurs propres de $ \varphi$ est le spectre de$ \varphi$.

3.2 Sous espaces propres

Définition :     Si $ \lambda\in\mathbb{K}$ est une valeur propre de $ \varphi$, on appelle sous-espace propre de $ \varphi$ associé à la valeur propre $ \lambda$,

$\displaystyle E_{\lambda}=\{u\in E$, $\varphi\left( u\right) =\lambda.u\} $

C'est donc l'ensemble des vecteurs propres associés à $ \lambda$ auxquels on adjoint le vecteur nul.

Théorème :   Le sous espace propre de $ \varphi$ associé à la valeur propre$ \lambda$, $ E_{\lambda}$ est un sous-espace vectoriel de $ E$.

Preuve.$ E_{\lambda}=\ker\left( \varphi-\lambda.Id_{E}\right) $ est dons un sous espace vectoriel puisque c'est un noyau. $ \qedsymbol$

Remarque :   On note $ E_{\lambda}=\ker\left( \varphi-\lambda.Id_{E}\right) $ même quand $ \lambda$ n'est pas valeur propre de $ \varphi$.
D'une façon plus particulière, $ E_{0}=\ker\left( \varphi\right) $.
Ainsi, 0 est valeur propre $ \Leftrightarrow\varphi$ n'est pas injective.

Théorème :   2 sous-espaces propres associés à des valeurs propres distinctes sont en somme directe.

Preuve. Soit $ u\in E_{\lambda}\cap E_{\mu}$, alors $ \varphi\left( u\right) =\lambda.u=\mu.u$, d'où $ \left( \lambda-\mu\right) .u=0$ et comme$ \lambda-\mu\neq0$, $ u=0$. $ \qedsymbol$

3.3 Vecteurs propres associés à des valeurs propres distinctes

Théorème :   $ E$ un $ \mathbb{K}$-e.v., $ \varphi\in\mathcal{L}\left( E\right) $,$ \lambda_{1},\lambda_{2},\ldots,\lambda_{n}:n$ valeurs propresdistinctes 2 à 2,$ u_{1},u_{2},\ldots,u_{n}:n$ vecteurs propres associés, alors la famille $ \left( u_{1},u_{2},\ldots,u_{n}\right) $ est libre.

Preuve. On pose

$\displaystyle \alpha_{1}u_{1}+\alpha_{2}u_{2}+\cdots+\alpha_{n}u_{n}=0 $

à laquelle on applique $ \varphi:$

$\displaystyle \alpha_{1}\lambda_{1}u_{1}+\alpha_{2}\lambda_{2}u_{2}+\cdots+\alpha_{n} \lambda_{n}u_{n}=0 $

à laquelle on retire $ \lambda_{n}$ fois la relation précédente, d'où :

$\displaystyle \alpha_{1}\left( \lambda_{1}-\lambda_{n}\right) u_{1}+\alpha_{2}\... ... u_{2}+\cdots+\alpha_{n-1}\left( \lambda _{n-1}-\lambda_{n}\right) u_{n-1}=0 $

Pour conclure, il suffit de remarquer que si $ \left( u_{1},u_{2},\ldots,u_{n-1}\right) $ est libre, alors $ \left( u_{1},u_{2},\ldots,u_{n}\right) $ est libre.
Comme $ \left( u_{1}\right) $ est libre, on a le résultat. $ \qedsymbol$

3.4 Exemples

  1. Homothétie de rapport $ \lambda$ Une homothétie de rapport $ \lambda$ possède une unique valeur propre$ \lambda$ et $ E_{\lambda}=E$. Tous les vecteurs, sauf le vecteur nul, sont propres.

    $ E=F\oplus G$

  2. Soit $ E=\mathcal{C}^{0}\left[ \mathbb{R}\right] $ et $ \varphi:E\rightarrow E$ telle que $ \varphi\left( f\right) :x\mapsto\displaystyle\int_{0}^{x}f\left( t\right) dt$
    En un mot, $ \varphi\left( f\right)$ est la primitive de $ f$ qui s'annule en 0. On va chercher les éléments propres de $ \varphi.$
    Il faut d'abord vérifier que $ \varphi$ est bien un endomorphisme, c'est à dire que c'est une application de $ E$ dans $ E$ qui est linéaire.
    $ \varphi\left( f\right)$ est clairement continue puisque c'est une primitive d'une application continue.
    De plus $ \varphi$ est bien linéaire par linéarité de l'intégration, $ \varphi$ est donc bien un endomorphisme.
    Cherchons en les éléments propres, c'est à dire les applications$ f$ non identiquement nulles et les scalaires $ \lambda$ tels que$ \varphi\left( f\right) =\lambda\cdot f$
    On écrit cette égalité pour un $ x$ quelconque :$ \varphi\left( f\right) \left( x\right) =\lambda f\left( x\right) $ ou encore $ \displaystyle\int _{0}^{x}f\left( t\right) dt=\lambda f\left( x\right) $ pour tout $ x$ réel. Si $ \lambda=0,$ pour tout $ x$ réel, $ \displaystyle\int_{0}^{x}f\left( t\right) dt=0,$ en dérivant, $ f\left( x\right) =0,$ $ f$ est l'application nulle et n'est donc pas un vecteur propre, 0 n'est donc pas valeur propre.
    Donc $ \lambda\neq0,$ d'où $ f$ est de classe $ \mathcal{C}^{1}$ sur$ \mathbb{R}$ et en dérivant, pour tout $ x$ réel, $ f\left( x\right) =\lambda f^{\prime}\left( x\right) .$
    On conserve la condition $ f\left( 0\right) =0$ pour avoir une équivalence.$ f$ est donc solution de l'équation différentielle linéaire du premier ordre à coefficients constants sans second membre $ \lambda y^{\prime}-y=0$, ce qui donne $ y=K$ $ \exp\left( x/\lambda\right) .$
    La valeur en 0 nous donne $ K=0$ et donc $ f$ est encore l'application nulle...
    Finalement $ \varphi$ n'a pas de valeur propre.



© Christophe Caignaert - Lycée Colbert - Tourcoing